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Le passé d’Albens puise ses racines dans la préhistoire

La présence des hommes de cette longue période où l’on ne connaissait pas l’écriture est attestée à Albens par de nombreuses découvertes.
La première a eu lieu il y a près de quarante ans lorsque les travaux de construction du collège Jacques Prévert mirent à jour une impressionnante pierre à cupules. Très vite identifiée et étudiée dans le premier numéro de la revue Kronos, elle allait se révéler être un précieux témoin d’une période allant du néolithique final à l’âge du fer. À ces époques, les hommes qui se sont installés ici apportent d’abord avec eux la pratique de l’agriculture et de l’élevage puis la métallurgie avec d’abord la fonte du bronze avant de maîtriser celle du fer. Ce sont des temps reculés que l’on peut dater de -3000 à -800 environ. Ces hommes qui nous ressemblent en tous points ont gravé à la surface de cette énorme pierre de 2,30 mètre de long pour un mètre de large un nombre impressionnant de petites cavités appelées cupules, au nombre de 130 environ. Leur signification nous interroge aujourd’hui encore.

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Pierre à cupules découverte lors de la construction du collège à Albens

Aurait-on affaire à une sorte de carte du ciel ? Le regroupement de certaines d’entre elles à deux endroits fait penser à une sorte de roue solaire. Peut-on supposer que l’on est en présence d’une pratique spirituelle ? Si rien ne peut le confirmer pour l’instant, on peut toujours en faire la conjecture.
D’autres découvertes ont eu lieu depuis. Il s’agit d’objets taillés dans du silex et qui ont été retrouvés en ramassage de surface tout autour d’Albens. Trois d’entre eux retiennent l’attention. Il y a d’abord une petite lamelle de silex qui est bien connue des archéologues pour être un élément constitutif du tranchant d’une faucille (ce qui nous renvoie aux premiers agriculteurs). Il y a ensuite un bel éclat de silex retouché sur deux côtés, de petite dimension (2,5cm sur 2 cm) et de belle facture.

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Éclat de silex retouché (ramassage de surface)

Il y a enfin un nucléus, petit bloc de silex à partir duquel les hommes de ces temps reculés taillent de petites lames comme celle qui composaient leurs faucilles.
Les dernières traces d’une présence préhistorique à Albens ont été trouvées lors des dernières fouilles archéologiques menées par les spécialistes de l’INRAP (Institut de recherches archéologiques préventives). Installés au bord de l’Albenche, les hommes avaient creusé des fossés dont deux tronçons furent repérés. Dans ces derniers furent trouvés trois morceaux de silex débités et des traces de charbon de bois qui ont permis une datation au carbone 14. Les résultats donneraient une chronologie assez large allant du néolithique jusqu’à la période précédant l’histoire et que l’on nomme Protohistoire.
Des habitants à Albens avant « l’Albinum » romaine, voilà un beau brevet de longévité pour une agglomération du XXIème siècle.

Jean-Louis Hébrard

Un mégalithe à Albens

Le témoin d’une occupation humaine très ancienne

Circonstances de la découverte

En mars 1978, lors des travaux de construction du collège Jacques Prévert à Albens, entre la R.N. « 510 » et la voie ferrée, les engins mécaniques mettaient à jour une pierre à cupules profondément enfouie dans le sol.
Sa découverte par des engins de terrassement causa quelques dommages à la partie inférieure, ainsi que des stries profondes sur la face gravée.
Elle fut alors transportée hors du chantier et se trouve actuellement sur une pelouse du collège, face à l’entrée principale.

Description du mégalithe

La pierre de forme allongée, a une longueur de 2,30 m pour une largeur maximale de 1,10 m. Son épaisseur varie entre 0,50 et 0,60 m.
Elle présente sur sa face supérieure une arête longitudinale (voir croquis).
Cette face est recouverte d’une patine brune, très foncée par endroit, qui tranche avec la teinte verte de la roche visible dans les parties endommagées.
Ce bloc de micaschiste verdâtre n’est pas une roche fréquente dans une commune entourée de montagnes calcaires, où les sols correspondent surtout à des moraines glaciaires et à des alluvions modernes.
Ce mégalithe présente sur la plus grande partie de sa face supérieure pas moins de 130 cupules de toutes dimensions.
Ces cupules sont regroupées plus particulièrement sur la moitié de la face supérieure et sur tout un côté (côté A.).
Certaines sont disposées de façon intentionnelle, en couronne autour d’une cupule centrale : c’est très net pour un ensemble du côté A.

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Leurs dimensions sont variables :
– La plus importante a une profondeur de 1,5 à 2 cm pour un diamètre de 7 cm.
– Quelques unes, de même profondeur, ont un diamètre de 5 à 6 cm.
– La majorité d’entre elles sont plus petites, très rapprochées surtout dans la moitié de la face supérieure.

Les pierres à cupules en Savoie : localisation ; datation

Les pierres à cupules sont assez répandues en Savoie , ces vestiges sont « abondants en Maurienne, Tarentaise, Bugey et Chablais ». (1)
Mais si on regarde une carte de la répartition des mégalithes (2), on constate qu’aucune découverte n’a été signalée à ce jour dans l’Albanais, jouxtant il est vrai le Bugey savoyard.

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Répartition des mégalithes
Régions à pierres à cupules nombreuses : 1) Chablais, 2) Bugey savoyard, 3) Maurienne et Tarentaise, 4) Régions à dolmens

Les pierres à cupules sont en général, surtout en Maurienne, située à une altitude supérieure à 1 500 m, celle d’Albens est sise dans une région de faible altitude (350m) loin des zones montagneuses. Une comparaison est peut-être à faire avec celle découverte sur le site des Marches, fouillé par le G.R.A.C.S. (3)
Là aussi, comme à Albens, une telle roche voisine avec une implantation romaine : céramique sigillée, mortier signé ATTIUS, à Albens.
Mais à Albens, il convient de signaler que lors des fouilles de juillet 1978, une lamelle de silex et un fragment de molette ont été découverts à quelques dizaines de mètres de ce mégalithe. Il faut y ajouter un éclat de silex retouché, découvert en 1984 (voir croquis).
Sans parler du problème de la destination d’un tel vestige, se pose celui de la datation, « de la fin du Paléolithique à la fin de l’antiquité ? » (4).
Si l’on accepte les conclusions du GERSAR, tendant à situer plus précisément ces gravures « au Néolithique final et surtout à l’âge des métaux » (5), on serait alors en présence à Albens d’une implantation humaine remontant à la fin de la Préhistoire.

Jean-Louis Hebrard

1) J. Prieur ; la Savoie antique : recueil de documents, p. 32.
2) Archéologia n° 121, article de A. Bocquet, p. 13.
3) Archéologia n° 128, article de J.M. Ferber, p. 65.
4) J. Prieur : la Savoie antique, p. 32.
5) Archéologia n°121, article du « Groupe d’études, de recherches et de sauvegarde de l’art rupestre », p. 42.

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Cette pierre à cupules, découverte lors des travaux de terrassement du collège, se trouve maintenant sur la pelouse d’entrée.

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Détail du côté A : on distingue bien la disposition des cupules en couronne autour d’une cupule centrale, et certaines détériorations subies par le mégalithe.

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Céramique signée ATTIUS, découverte à proximité de la pierre à cupules.

Industrie lithique à Albens

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Fragment de lamelle retouchée. Lamelle de silex : élément de faucille ?

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Éclat de silex retouché. 1984, découverte de surface.

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Fragment de molette découverte en fouille (1978).
Les molettes servaient à broyer les grains.

Article initialement paru dans Kronos N° 1, 1986